Dernière mise à jour :
19/12/2010
Présentation
Le pontage d'amplificateurs BF (bridge en anglais) consiste à utiliser
deux amplificateurs identiques alimentés avec des signaux audio en
opposition de phase et à leur faire attaquer le même haut-parleur.
Cette technique permet en théorie d'obtenir une puissance quadruple de
celle qu'on aurait avec un seul des deux amplificateurs. Cet article
décrit en détail le principe du pontage et parle des limites techniques
auquelles on peut se trouver confronté.
Principe de base du pontage
Le
principe est simple dans les faits : il consiste à appliquer à l'entrée
d'un premier amplificateur un signal BF tel que la source le fournit (sortie
table de mixage par exemple) et à fournir au second amplificateur le
même signal mais de polarité opposée (mis en opposition de phase).
Chaque borne de l'unique HP est ensuite connectée sur la sortie d'un
ampli.
Comme
les signaux appliqués sur l'entrée des amplificateurs sont en
opposition de phase et que les amplificateurs sont identiques, on
retrouve cette inversion de phase entre les sorties des
amplificateurs. Sur le synoptique qui précède, l'amplificateur AMP1
reçoit le signal BF non déphasé et fournit sur sa sortie le même signal
BF amplifié mais non déphasé. Par contre, l'amplificateur AMP2 reçoit
sur son entrée un signal BF déphasé de 180 degrés et ce déphasage est
toujours là sur sa sortie amplifiée.
Avertissements et remarques
- Ce procédé de pontage ne fonctionne que si les deux voies
d'amplification présentent des sorties
amplifiées avec la borne (-) à la masse. Il suffit de
vérifier à l'ohmètre (ampli
débranché) que la résistance ohmique entre les
bornes moins des deux sorties amplifiées est inférieure
à 1 (un) ohm.
Ce procédé ne fonctionne pas avec
des amplis dont la structure de fonctionnement est déjà
un montage en pont.
- Il existe dans le commerce des
amplificateurs BF dont la sortie amplifiée délivre un signal dont la
phase est opposée à celle du signal d'entrée. Ce n'est pas très grave
si on utilise deux amplificateurs de ce genre identiques pour réaliser
un système ponté, car le résultat final sera "cohérent" et on pourra
retrouver la phase d'origine en branchant le HP à l'envers. Mais il est
certain que c'est moins rigoureux.
Pourquoi 4 fois plus de puissance avec deux amplis pontés ?
Avant
toute chose un petit rappel : les HP sont spécifiés comme ayant une
impédance donnée, par exemple 4 ou 8 ohms. L'impédance réelle d'un HP
n'est pas constante et dépend de la fréquence du signal électrique
qu'on lui applique, voir page
Impédance et
Associations de HP
pour plus de détails. Dans le texte qui suit et pour simplifier la
compréhension, on suppose qu'on travaille avec une impédance fixe.
J'ai un peu peur de vous le dire, mais c'est la vérité : tout tient dans une formule mathématique qui est la suivante :
P = (U * U) / R
où P est la puissance en Watts, U la tension efficace appliquée aux bornes du HP et R l'impédance du HP en ohms.
Si par exemple vous disposez d'un amplificateur BF délivrant une
tension sinus efficace de 7,07 Veff sur une charge résistive de 4 ohms,
la puissance dissipée dans la résistance sera de :
P = (7,07 * 7,07) / 4 = 12,5 W
(7,07 Veff ou 7,07 Vrms correspond à 20 Volts crête à crête, quelques détails supplémentaires en page
Ces watts qui nous sont si chers)
Voilà
pour un amplificateur donné. Supposons maintenant que nous utilisons
deux amplis de ce type en mode ponté : le HP de 4 ohms reçoit sur une
de ses bornes ce signal amplifié de 7,07 Veff (20 Vcac) dans une
polarité donnée. Si la crête du signal est à son maximum positif sur la
sortie du premier amplificateur, la crête du signal sur l'amplificateur
déphasé sera à son maximum négatif. Ce qui conduit au final à appliquer
au HP une tension double de celle d'origine, soit 14,14 Veff (40
Vcac).
Si on reprend les mêmes valeurs que celles adoptées dans l'exemple précédent avec un seul ampli, nous pouvons alors écrire que :
P = (14,14 * 14,14) / 4 = 50 W
La puissance a bien été quadruplée pour un rapport de tension de deux et pour un HP de même impédance.
Pas si simple que ça...
Génial,
non ? Deux amplis identiques, un HP de même impédance mais capable de
supporter quatre fois plus de puissance et le tour est joué ! Oui
mais... Comment donc les amplificateurs BF voient-ils cette nouvelle
charge ? Chacun des deux ne voit plus un HP relié à une masse, mais un
HP relié sur une autre source de puissance. Est-ce la même chose ? Non
point ! D'un point de vue sortie ampli, la charge vue correspond à la
moitié de l'impédance du HP. C'est un peu comme si le HP avait été
découpé en deux parties égales et que le "point commun virtuel" se
retrouvait à la masse.
Ce
qui amène à une remarque qu'on aurait d'ailleurs pû faire avant : le
courant de sortie fourni par chaque ampli a été doublé ! La conclusion
tombe sous forme de contraintes auquelles on ne peut rester insensibles
:
- les amplificateurs doivent être capables de travailler avec une impédance de charge moitié moindre (ici 2 ohms);
- ils doivent être capables de débiter le courant qu'il faut sans provoquer de surcharge thermique;
- l'alimentation secteur de chaque ampli doit être assez dimensionnée pour le surplus de travail demandé.
En conclusion...
Si
vous tentez de monter en pont deux amplis hifi de salon, vous allez
pouvoir tirer un peu plus de puissance que le double de chaque ampli,
mais certainement pas le quadruple ! Au mieux pourrez-vous espérer le
triple de puissance. Rappellez-vous aussi à ce qui a été dit pour les
impédances : l'ampli doit supporter une impédance moitié moindre. Si
vous branchez un HP de 4 ohms sur l'installation pontée, la charge vue
par les amplis sera de 2 ohms. Avec des amplis hifi de salon, il n'est
pas souvent recommandé de descendre aussi bas. Vous pouvez par
précaution monter un HP de 8 ohms entre les deux sorties pontées,
chaque ampli verra ainsi une charge de 4 ohms. De toute façon, la
rigueur de l'opération vous impose de connaitre la charge minimale
supportée par vos amplis, donnée fournie par le fabricant. Si ce
dernier dit impédance minimale 4 ohms en mode d'utilisation
normal, alors pas de mystère, vous ne devrez pas descendre en dessous
de 8 ohms en mode ponté. Bien entendu la puissance ne sera pas
quadruplé ni même triplée dans ce cas.
Pour un ampli de sono il en
va différement. Ce type d'ampli est normalement prévu pour disposer
d'une bonne réserve de puissance (alimentation bien dimensionnée) et
pour pouvoir fonctionner à plein régime pendant plusieurs heures
d'affilé. On trouve bien sûr des amplis de sono bas de gamme qui ne
pourront pas suivre mais vous saurez sans doute les reconnaitre par
leur poids, leur prix ou les commentaires laissés sur tel ou tel forum
de discussion. Si dès le départ vous savez qu'il vous faut un ampli de
1 kW, il y a de fortes chances que vos yeux se tournent vers un ampli
de sono qui pourra travailler en mode normal ou en mode ponté, avec des
inscriptions clairement établies par le fabricant et clairement
indiquées par sérigraphie sur l'équipement. Par exemple l'amplificateur
HPA A1800 (référence prise au hasard sur le net) est donné pour pouvoir
délivrer les puissances suivantes :
- Puissance max en mode stéréo (les deux voies d'amplification restent séparées) :
2 x 400 W / 8 ohms
2 x 600 W / 4 ohms
2 x 900 W / 2 ohms
- Puissance max en mode Mono bridge (les deux voies d'amplification sont pontées) :
1 x 1200 W / 8 ohms
1 x 1800 W / 4 ohms.
Il
apparait qu'on peut disposer d'une puissance triple (par rapport à une
seule voie d'amplification) avec charge de 4 ou 8 ohms, et il est clair
que le mode ponté avec HP de 2 ohms n'est pas autorisé. Si cela avait
été autorisé et avec une théorie belle comme une nuit de Noêl, l'ampli
aurait pû débiter 2700 W à 3600 W sur un seul HP de 2 ohms...