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Parents épanouis, enfants épanouis
Dernière mise à jour :
23/09/2012
Présentation
Je pense que mon ex-femme et moi faisons partie de cette grande
majorité de parents qui cherchent à
toujours faire mieux pour le plus grand bien de leurs enfants. Et
bien entendu, nous faisons sans doute aussi partie de ces mêmes
parents qui se trouvent
confrontés un jour ou un autre à des situations ou des
crises qui les
dépassent, et auxquelles on ne sait que répondre ou
faire. On a tous plus ou moins en tête des souvenirs du
passé où
nous avons moralement souffert, et que nous souhaitons ne pas voir se
reproduire :
"Je ne renouvellerai pas les erreurs de mes parents". Que tout
cela est
facile à dire, n'est-ce pas. Mais dans les faits, comment
agir et réagir ?
- Offrir à nos enfants une
assistance dont ils se passeraient volontier, car on est
évidement indispensable à leur survie ?
- Les forcer à mettre un manteau quand ils affirment ne pas avoir froid
?
- Leur affirmer qu'une égratignure ne peut pas être douloureuse, pour
les rendre plus fort ?
- Leur dire que tout ce qu'ils font est merveilleux, en vue de les
encourager ?
Suis-je
un monstre que de ne pas me demander si ces façons de faire sont -
contre toute attente - préjudiciables au développement de l'autonomie
de l'enfant ?
Remarque (09/07/2012) : ma femme et moi sommes désormais séparés mais
cela n'enlève rien au texte qui suit, puisque nous continuons
d'appliquer les mêmes méthodes avec nos enfants.
Haim Ginott, Adele Faber et Elaine Mazlish
"
Parents
épanouis, enfants épanouis" est le titre d'un livre
écrit par Adele Faber et Elaine Mazlish et traduit en
français par Roseline Roy (titre original "Liberated parents,
liberated children"). Il est basé sur des expériences
vécues au sein d'ateliers organisés par Haim Ginott,
psychologue pour
enfants. Voilà
des personnes qui ont changé bien des choses dans notre
façon
d'appréhender l'éducation de nos enfants. Haim Ginott a
écrit plusieurs livres et donnait des conférences sur les
relations parents / enfants, et insistait particulièrement sur la
façon
de parler aux enfants (comme invitait à le faire Françoise Dolto). Il est des
mots qui
bloquent, qui dévalorisent, qui infantilisent et n'aident point
au
développement de l'enfant. Ce sont des mots que l'on emploie
malheureusement trop souvent, et le tout est d'en prendre conscience
pour ne pas rester dans l'erreur. Cela, ma femme et moi l'avons appris
au fil du temps et au bout de quelques lectures et discussions, ça ne
vient évidement pas tout seul. Dans notre cas, on
peut parler de hasard car le premier livre qui nous a permis d'engager
ce genre de réflexions nous a été
prêté par une de mes soeurs. Je ne
suis pas convaincu que je l'aurais acheté si je l'avais vu en
rayon
dans une librairie. A la limite, peu importe, le principal est que les
textes de Adele Faber et Elaine Mazlish (qui ont assisté
à grand nombre d'ateliers
organisés par Haim Ginott) nous aient atteint et aient ouvert
plusieurs voies dans notre façon de
changer de comportement. Oui, car il faut bien le dire,
améliorer la
communication avec nos enfants apporte un plus évident,
très rapidement
notable et agréable à constater, mais demande un grand
travail sur soi : celui de casser une
grande partie de ses habitudes. Cela demande de la patience et des
remises en causes constantes, et l'on
doit avoir conscience qu'une telle évolution ne peut
s'opérer
pleinement en quelques mois. C'est un travail de longue haleine, mais
où certains petits signes (de la part des enfants)
confortent l'idée que nous sommes sur la bonne route et
qu'il faut
continuer.
Travailler seul ?
C'est
ma femme qui à l'époque avait commencé à appliquer les (pistes de)
méthodes de Haim Ginott (méthodes qui ont
été traduites en français par "habiletés
parentales"), et je lui en suis sacrement
reconnaissant. Au début, je gardais un peu mes distances et
observais sans trop rien dire, pour voir quels résultats on
pouvait obtenir en prenant les enfants "avec douceur". J'avoue que je
n'y croyais qu'à moitié. Puis face aux résultats
obtenus, j'ai dû me rendre à l'évidence : il y
avait vraiment du bon dans cette façon de faire. J'ai pleinement
adhéré à l'idée, et il n'y a pas eu besoin de m'y pousser. J'ai
lu moi aussi le livre, et j'ai appliqué les même règles. Il m'arrivait souvent de
ne pas avoir les bons reflexes, mais ma femme savait rapidement
récupérer le coup et je la laissais faire car elle s'y prenait mieux que moi.
Je fais
un peu de musique,
et il fut une époque où je voulais apprendre à
jouer du piano. Plus
de place au conservatoire (surtout pour les élèves de mon âge), je me
suis
donc acheté une méthode et ai commencé à
travailler seul, dans mon
coin. Vous imaginez sans doute combien de temps cela a duré...
Disposer
d'un livre qui relate quelques expériences entre parents et
enfants, et
qui y apporte son lot de réflexions, est certes fort utile, et
nombreux
sont les exemples où l'on se reconnait. Mais cela ne suffit pas
car toutes les situations n'y sont évidement pas
recensées et
établir un lien avec celles évoquées demande
parfois un minimum
d'expérience et d'habitude. On ne change pas du jour au
lendemain,
surtout pour des comportements dont on avait acquis la certitude de
leur bien-fondé. Pour cette raison, ma femme et moi avons
décidé
d'assister à des
ateliers
réunissant plusieurs parents
ayant tous en
commun la volonté de vivre mieux avec leur enfants, et dont le
but était
simplement d'échanger ses propres expériences et d'en
tirer des
conclusions (les enfants n'avaient pas le droit d'assister à ces réunions).
Donner le choix
La notion de choix est une valeur très importante. Donner le choix
entre deux options plutôt que d'énoncer une interdiction,
impose à l'enfant de prendre une décision,
qui est la sienne, et cela le
responsabilise.
Exemple 1 - Jeux interdits à la maison
Notre garçon joue au ballon dans le salon, avec un de ses copains.
Avant,
on lui disait "Combien de fois doit-on répeter qu'il est
interdit de
jouer au ballon dans le salon ?". Il continuait (pas question
d'être faible devant le copain) et attendait qu'on lui prenne son
jouet.
Ensuite, nous avons
dit "Le règlement de la maison interdit de jouer au ballon à
l'intérieur de la maison. Tu as le choix entre jouer dehors ou ranger
le ballon." L'effet a été immédiat, il est sorti avec son copain, sans
aucun signe d'agacement.
Exemple 2 - On ne mange pas n'importe où dans la maison
Notre fille mange un morceau de pain dans le salon. Bien sûr elle sait
qu'elle n'en a pas l'autorisation et nous regarde bien dans les yeux.
Avant,
on lui disait "On ne mange pas dans le salon".
Ensuite, nous avons
dit "Tu peux manger dans la cuisine ou dehors". Réaction positive bien plus rapide !
Ne pas surévaluer
Dire à un enfant que ce qu'il
vient de terminer est magnifique (écriture, dessin,
luminaire en carton ou autre) peut lui laisser penser
qu'il ne
pourra pas faire mieux. Car pour aller au-delà du magnifique, que faire ? Mieux vaut lui dire qu'on aime bien, que cela
nous fait penser à telle ou tel chose (si la chose existe déjà et est
connue - voir célèbre - c'est plutôt
valorisant). Lui dire que ce qu'il vient de faire est
complètement nul et qu'il n'y arrivera jamais n'a
évidement aucun sens, puisqu'avant chaque nouvelle tentative il
va s'avouer vaincu d'avance et donc renoncer (c'est typiquement le
genre de remarque qui reste ancrée dans la vie adulte et qui
empêche plus tard de prendre des décisions importantes). Ne surtout
pas comparer son travail avec celui d'un des ses frères ou
soeurs (ni avec aucune autre personne d'ailleurs) : il faut bien faire
la différence entre relation parentale et
fratrie. Il faut trouver le juste
milieu, celui qui va l'encourager à s'améliorer.
Conforter l'enfant dans ses capacités et lui donner confiance en lui
Ca, je le pense depuis longtemps et je l'appliquais déjà : il est très important qu'un
enfant se sente capable de faire quelque chose. Il ne faut pas qu'une mauvaise
note dans son cahier scolaire lui fasse pas penser qu'il
est nul et incapable. Il a été noté mal, soit.
Mais par une personne qui ne pense pas forcement comme lui, et à un instant donné, pour un exercice donné.
L'important est que lui-même sache qu'il est capable de quelque
chose, ce qu'il en pense
lui
doit passer par-dessus tout le reste. Il a envie de faire quelque chose que
vous savez pertinement impossible ? Plutôt que de lui dire que
toute tentative est vouée à l'échec et donc
inutile, pourquoi ne pas le laisser découvrir ça tout
seul ? Il est certain que ça le renforcera.
Exemple 1 - Pas facile de souder
Lorsque à 7 ans ma fille Flavie à fait ses premières soudures sur
un circuit imprimé, elle avait peur que les composants
brûlent, et pour cette raison elle ne laissait pas le fer à
souder assez longtemps. C'était de ma faute : je lui avais dit qu'il ne
fallait pas chauffer les composants trop longtemps, au maximum
quelques secondes.
Je n'avais pas du tout pensé que le terme "quelques secondes" pouvait
vouloir dire "il faut faire très vite". Résultat, la
soudure était mal
faite et cela l'énervait, répétant qu'elle n'y
arriverait jamais. Je n'en étais pas totalement sûr, mais
il me semblait qu'elle avait un peu peur que je la gronde si elle
abimait quelque chose. Je lui ai alors dis : "Que tu grilles un ou
plusieurs composants n'a aucune importance, j'en ai plein d'autres. Tu peux donc laisser le fer plus longtemps
pour voir ce que cela donne". La soudure suivante était
parfaite. J'ai vu son sourire, et les soudures
suivantes étaient parfaitement réussies.
Exemple 2 - Que d'histoires !
Mon fils Timothée s'est
mis à écrire une histoire
du style "mise en abime" (deux miroirs mis face à face avec les reflets
infinis) qui mettait en scène un enfant qui raconte une histoire dont
il est
l'acteur principal. Beaucoup de fautes d'orthographe jonchaient le
parcours, et
quand je les lui ai signalées pour correction (pensant bien
faire), j'ai bien vu
qu'il faisait la moue, car ce n'était pas ce qu'il voulait
entendre de moi. Je lui ai alors dit que les fautes n'étaient
pas le plus important dans l'histoire et qu'elles pouvaient être
corrigées plus tard, que son histoire était basée
sur une super idée et que j'étais très curieux de savoir s'il
y aurait une suite. Il s'est éclairé d'un coup, et a
répondu que oui, bien sûr, l'histoire n'était pas
finie. Le soir même, il m'a montré son cahier : en plus de
son histoire qu'il avait terminée, il y avait une autre histoire
et une chanson... avec les notes de musique ! Un petit handicap
mais qui j'en suis sûr se corrigera avec le temps, ne doit pas
l'empêcher de développer une capacité certaine. Il
est sûrement bon de montrer les points faibles en précisant bien que
"ce
sera mieux la prochaine
fois" et sans insister plus que ça, mais il est
aussi tellement valorisant de montrer que l'on apprécie ce qui
est original ou bien fait... sans pour autant forcement utiliser les
termes merveilleux, formidable, extraordinaire...
Exemple 3 - Circuit électronique abimé
Un jour, j'ai réalisé un circuit électronique dont
les composants étaient directements soudés entre eux,
sans le classique support circuit imprimé (
celui-là).
Notre fille Adèle (5 ans) m'a demandé si elle pouvait
jouer avec, et j'ai répondu oui en
précisant bien que l'ensemble était très fragile.
Quand elle m'a rendu le montage qui avait
passé une partie de la journée à
l'intérieur d'une peluche, j'ai eu du mal à
reconnaître le circuit. Je lui dit "Oh, c'est dommage, le circuit
est tout abîmé. Je ne sais pas si je vais pouvoir t'en
confier d'autres, maintenant.". Si je n'avais pas noté ma
reflexion dans mes
mots d'enfants,
je ne m'en serais pas souvenu. Je regrette maintenant ce que j'ai dit,
car cela n'a certainement pas dû la mettre en confiance. J'aurais
plutôt dû dire quelque chose du genre "Oh, c'est dommage,
le circuit
est tout abîmé. Il faudra faire plus attention avec le
prochain que je te confierai" (sous entendu : j'attend de toi que tu
fasses plus attention la prochaine fois). On ne s'en rend pas compte,
mais ce sont
des mots de tous les jours dont la portée nous échappe. Des petites
empreintes qui conditionnent l'avenir de
l'enfant bien plus qu'on le pense. La vie est un long
apprentissage ;-)
Faire confiance aux capacités des enfants
Les enfants sont
capables de beaucoup ! A plusieurs reprises ils ont apporté des
solutions à des problèmes que nous parents n'avions su résoudre. Après
tout je ne vois pas de raison pour que ce ne soit pas le cas. Leur
confier la résolution de problèmes d'adutes est une marque de
confiance, qui leur servira quand ils seront grands. Et bien sûr, leur
laisser gérer eux-même les problèmes de fratrie fait partie de l'exercice.
Accueillir les sentiments
L'accueil des sentiments fait
aussi partie de ces choses auxquelles on peut malheureusement facilement passer à côté.
Et pourtant... Dire à un enfant qui vient de tomber que ce n'est pas grave et qu'il
s'agit d'une petite blessure, peut fort bien soulever en lui
des questions relatives à notre compassion. Il n'est pourtant pas difficile de lui dire quelque chose
du genre "Oh, tu t'es fait mal. Nous allons soigner ça dès que nous
serons à la maison.". Même s'il ne s'agit "que" d'une égratignure et
que ça ne saigne pas, et même si les soins se limitent à la pose d'un
petit pansement ou d'un mouchoir en papier humidifié, l'enfant verra
qu'on s'interresse à ses "problèmes". L'accueil des sentiments ne
s'arrête évidement pas aux petites (ou grosses) blessures physiques. Un
enfant qui rentre à la maison en pleurant, aime qu'on aille le voir
pour lui demander ce qui ne va pas. Et s'il n'a pas envie de parler sur
le moment, lui faire simplement savoir qu'on est prêt à l'écouter. Même plusieurs jours après.
Exemple 1 - Dispute avec un copain
Notre
fils Timothée (8 ans) rentre en pleurant, avec en lui une
colère et une
peur qui l'avaient rarement habité. Il traverse la maison en
trombe et
ressort dans le jardin de derrière, puis s'assoit dans un coin
pour
pleurer. Les disputes avec les copains ne sont pas rares, mais
c'était
la première fois que je le voyais dans un tel état. Il tremblait. Je me
suis
assis à côté de lui et ai dit : "Tu as vraiment
l'air en colère et tu
sembles avoir peur. Veux-tu me dire ce qui s'est passé ?". Je
m'attendais un peu à un silence de sa part, mais il a
répondu aussitôt
oui. "François" (*) m'a foncé dessus avec son
vélo, il voulait vraiment
me faire mal.". Je répondai "Ah, ce n'est pas très gentil
de sa part.
Lui avais-tu fait quelque chose qu'il n'a pas aimé ?". La
réponse fut
non. J'ai alors proposé la chose suivante : "Veux-tu que nous
allions tous les deux voir François, pour discuter du problème
?". Il a un peu
hésité mais à répondu par l'affirmative.
Arrivé près de François, je
lui ai dit bonjour et ai précisé que je ne venais pas
pour le gronder
mais pour parler (je n'aurais évidement pas eu l'intention de le
gronder, l'idée était plutôt de le mettre à
l'aise).
J'ai fixé les règles suivantes : "Timothée m'a dit
que tu lui avais
foncé dessus avec ton vélo. J'aimerais entendre votre
version des faits
à tous deux. François va parler en premier, et ensuite ce
sera le tour
de Timothée.". François m'a alors dit que Timothée
lui avait donné un
coup de manteau dans la figure, et qu'il aurait pû avoir
très mal. Et
il était vrai qu'il lui avait foncé dessus avec son
vélo, mais "tout
doucement". En connaissance de cause, j'ai résumé la
situation :
"Timothée, tu as donné un coup de manteau à
François, et il a eu très
peur que ça lui fasse mal. François, tu as fait
très peur à Timothée en
lui fonçant dessus avec ton vélo. Maintenant, que
proposez-vous de
faire ?". La réponse fut instantannée : "On se dit
pardon.". Ils se
sont serré la main et sont reparti jouer ensemble. Je n'en suis
pas
certain, mais il me semble que si je n'avais pa été
attentif à ce
problème, une certaine rancoeur aurait pû s'installer
entre les deux garçons. En même temps,
la construction de l'adulte passe par de tels évenements, et les
querelles appartiennent parfois très vite au passé. Mais
pour
moi, le principal était de montrer qu'en cas de problème,
Timothée
pouvait compter sur une présence adulte. Je vous rassure, je ne
sors pas à chaque fois qu'éclate une dispute ;-)
(*) Prénom volontairement modifié.
Exemple 2 - Papa est malade
Des
problèmes de santé embêtants mais sans gravité m'ont amené à séjourner
à l'hopital pendant dix jours. Ma femme était seule à la
maison pour s'occuper de nos quatre enfants, le temps de s'organiser un
peu avec la famille et les amis. Les visites à l'hopital étaient
interdites à nos enfants (aucun ne dépassait l'âge de 12 ans), ils ont
du se contenter des compte-rendus réguliers de ma femme, après chaque
visite qu'elle me rendait. Puis celle-ci sentant un peu d'inquiétude
chez eux, elle a décidé de faire une "soirée-réunion" pour parler de
moi et de ma maladie, où chacun pouvait poser les questions qu'il
voulait. La première à se manifester a été Adèle (5 ans) : "J'ai peur.
Je crois que papa va mourir.". Les choses étaient posées. Ma femme a
dit tout ce que les enfants voulaient savoir, en précisant bien que mes
jours n'étaient pas en danger, que j'étais très bien soigné et que
j'allais de mieux en mieux. Nos
enfants étaient vraiment inquiets, ils m'ont vu partir en mauvaise
santé et ne me voyaient pas revenir. Essayez d'imaginer ce qui peut passer
par leur tête... Là encore, il s'agissait d'accueillir leur
sentiments.
Disputes entre enfants
Pendant longtemps, ma femme et moi pensions qu'il fallait
intervenir quand nos enfants se disputaient. Ce que nous ne
faisons plus, sauf
quand il y a insultes ou coups (ce qui est devenu très rare). Si
un de nos enfants se plaint auprès de nous pour une maladresse
occasionnée par un frère ou une soeur, nous le renvoyons
directement vers le "fautif" et lui demandons de s'expliquer sur le
problème avec lui et non avec nous. La plupart du temps,
s'expliquer avec lui revient simplement à dire "Ce que tu as
fait ne me plait pas, je n'aimerais pas que tu recommences". On se rend
compte assez vite que les enfants n'ont pas toujours réellement
conscience du mal ou de la peine qu'ils occasionnent, et le fait de
laisser l'enfant lésé s'exprimer à plus de poids
que de laisser les parents le faire à sa place. Pour l'enfant
"attaquant", il s'agit plus d'une "explication entre quatre yeux" que
d'une "punition", et il y est en général plus ouvert.
Pour appuyer cette méthode, nous avons mis en place un tableau
(devenu par la suite un cahier) "J'aime, j'aime pas", où nos enfants et
nous-mêmes
parents, pouvons nous exprimer. Nous y inscrivons ce qui nous fait
plaisir et ce qui risque de nous fâcher. Par exemple, nous
n'aimons pas entendre les portes claquer parce que ça fait du
bruit, ça abîme les portes et des doigts
peuvent s'y coincer. Nous l'avons noté sur le tableau (cahier), et
depuis
les portes ne claquent quasiment plus jamais. Cela arrive encore
occasionnellement car les enfants ont besoin qu'on leur répète
plusieurs fois la même chose, et parfois la cause est due à un courant
d'air... ce que les enfants ne manquent pas de préciser quand ça arrive
!
Premiers constats d'amélioration relationnelle
Les enfants vivent mieux,
et nous (parents) aussi. Un climat de confiance s'installe, où chacun
respecte les sentiments des autres : bien plus simple quand il s'agit
de les exprimer pour montrer qu'on a bien compris ce que ressent
l'autre ! Ca semble tout bête, comme ça, mais on a plusieurs exemples
qui montrent les différences de comportement en fonction de nos
réactions et surtout de nos mots.
Exemple 1 - Verre de jus d'orange renversé
Un de nos enfant renverse un verre de jus de fruit. Pas
de punition pour ce genre de chose (on est opposé aux
punitions), mais il y a la façon de présenter les choses.
Avant,
je disais "Quand je renverse quelque chose, je le nettoie. Il est donc
normal que tu fasses de même. Va chercher l'éponge et nettoie, s'il te
plait". Ca ronchonnait sec et c'est moi au final qui nettoyais.
Maintenant,
je dis (presque amusé) "Tiens, un verre renversé...", et en même temps
je tends
l'éponge, sans rien dire d'autre. Celui qui a renversé le verre ne se
rebiffe absolument pas et nettoie aussitôt.
Remarque
: au début, on tendait l'éponge car le réflexe de la prendre soi-même
n'était pas installé. Maintenant le geste est automatique.
Exemple 2 - Catastrophe dans la salle de bain
Deux
enfants (sur les quatre que la maison comportait à ce moment) prennent le bain en
même temps. Un peu de chahut et au final beaucoup d'eau par terre.
Avant, on disait "Oh non,
regardez ce que vous avez fait ! Si vous recommencez, vous ne pourrez
plus prendre votre bain ensemble !"
Recemment,
ma femme a dit "Je suis bien embêtée de voir autant d'eau par terre. Je
me
demande qui va nettoyer tout ça.". Dans les minutes qui ont suivies, et
sans que nous ayons demandé quoi que ce soit, les deux enfants ont pris
une serviette et ont tout essuyé.
Et ce qui est drôle, c'est qu'en s'obligeant à parler
autrement avec les enfants, on s'habitue à se parler à
soi-même de la même façon.
Exemple 3 - Tartine tombée dans le bol
A qui cela n'est-il jamais arrivé ? Je prend mon morceau de pain en vue
de le tartiner, et plouf !
Jusqu'alors, je disais "Flute,
flute et zut !" et je bougonnais pendant 30 secondes.
La dernière fois que cela m'est
arrivé, j'ai dit "Oh, le poisson a sauté dans l'eau, il devait avoir
drôlement soif."
Détente assurée... pour moi en premier !
Tout est donc rose dans ce monde merveilleux ?
Non, bien entendu. Les nouvelles "habiletés" que nous appliquons
mon ex-femme et moi même dans nos appartements respectifs fonctionnent souvent mais pas toujours. Il n'existe
évidement pas de recette miracle (sinon un livre serait
déjà paru pour les enoncer toutes) et chaque situation
réclame une attention particulière et de la
réflexion : "Je n'avais pas prévu une telle
réaction ou une telle réponse de la part de mon enfant,
comment prendre la chose ?". Et même si cela est moins
fréquent qu'avant, il arrive encore que nous nous
énervions réellement et élevions la voix assez
fort pour être entendu jusqu'au bout de la rue. Car les enfants
sont bien souvent imprévisibles et cherchent en permanence
à nous tester, ce qui fait parfois bien bouillir la cocotte.
Mais heureusement, nous avons encore le droit de nous fâcher, et
cela est heureux car nos enfants ont
besoin
de savoir quand nous ne sommes pas content. Le principal
étant toujours, en cas d'explosion, de ne point sortir de mot
d'injure, de menace ou de punition. Il est difficile (et fortement
déconseillé) de garder sa colère en soi, mais il
est assez facile, finalement, de choisir ses mots pour l'exprimer. Oh, bien sûr, il y a bien des fois où les
paroles dépassent la pensée, et certains mots peuvent
faire très mal et rester en mémoire durant des
années durant. Mais il faut voir tout cela comme une
politique globale de comportement :
on ne peux pas tout réussir à 100 %, l'important est de faire au
mieux. Et puis quand on va trop loin, rien ne nous interdit de nous excuser... même le lendemain ou plusieurs jours après.