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> Ces watts qui nous sont si chers...
Dernière mise à jour :
15/01/2017
Présentation
Vous pouvez le constater de vous même comme moi-même l'ai constaté,
certains fabricants et vendeurs de matériel audio n'hésitent pas à
employer des termes tordus pour exprimer la puissance de sortie d'un
amplificateur, aussi bien dans le domaine multimédia (petites enceintes
amplifiées), que dans le domaine de la hi-fi ou de la sono. On trouve
ainsi des Watts RMS, des Watts musicaux, des Watts maximum, des Watts
moyens, des Watts PMPO, des Watts DIN, et pourquoi pas, un jour ou
l'autre, des Watts MAELM-IPUMDW (Mon Ampli Est Le Meilleur, Il Pête Un
Max De watts). Pendant longtemps, j'ai pensé (et cru) que le seul type
de Watts dont on devait tenir compte était le Watt RMS, également connu
sous le terme de Watt efficace. Peut-être parce qu'en lisant le mot
"efficace", et surtout à cause de mon ignorance (relative) dans le
domaine, j'avais un peu le sentiment de ne pas avoir affaire à
n'importe quoi. Peut-être aussi parce que les fabricants de composants
de puissance dédiés aux applications audio n'hésitent pas à employer ce
terme dans leurs documents techniques. Et puis un jour quelqu'un m'a
écrit pour me demander
quel type de puissance sortaient les amplis dont les schémas sont mis à
disposition sur mon site : "Watts RMS ou autre ?". Pour moi il était
évident qu'il s'agissait de Watts RMS, et j'allais répondre,
presque sûr de moi, quand tout à coup j'ai ressenti un instant de
faiblesse, je me suis comme qui dirait senti un peu perdu. Et
j'ai soudain senti pousser l'envie de profiter de cette
question
pour faire
un petit papier résumant les différences principales existant entre ces
différentes types de puissances. Si pour moi la notion de RMS était
évidente, et si pour moi la notion de Watt PMPO était une pure arnaque
commerciale, je voulais tout de même en savoir un peu plus. J'ai donc
pianoté un peu sur internet, et je me suis rendu compte que la question
n'était pas si simple. Peut-être à l'époque déjà avais-je flairé le
danger (celui de ne rien comprendre) et m'étais-je réfugié vers des
réponses limités, qui me convenaient. Quand j'ai fabriqué mes premiers
amplis de voiture (booster à base de TDA2002 et TDA2003 montés en
pont), j'avais bien noté (avec mes seules oreilles comme instrument de
mesure) que leur puissance de sortie était supérieure à celle de
l'autoradio que mes parents avaient à l'époque. Et cela me suffisait :
il y avait plus de puissance et le son n'était pas (ne semblait pas)
moins bon. Je passe sous silence les premiers exemplaires d'ampli, qui
oscillaient et chauffaient méchament. La présente page résume ce que
j'ai compris à ce jour (fin 2009). Ne la prenez pas comme argent
comptant, mais plutôt comme une base de réflexion. Je fais des erreurs
depuis que je suis gosse (à croire que j'aime ça), et je serais bien
attristé d'apprendre que le texte qui suit puisse être pris comme
référence. Ce n'en est pas une !
Qu'est-ce que le Watt, d'un point de vue auditif ?
Le
watt est l'unité utilisée pour exprimer une puissance. Il peut s'agir
de la puissance électrique en sortie d'un amplificateur audio, de la
puissance accoustique fournie par un haut-parleur, tout comme il peut
s'agir de la puissance dissipée sous forme de chaleur par un composant
électronique (résistance, transistor, ou autres). Quand on parle de la
puissance d'un haut-parleur, on ne parle pas de la puissance sonore que
le haut-parleur est capable de fournir, mais de la puissance électrique
qu'il est capable de supporter sans risque de déterioration. Comme le
watt est l'unité privilégiée pour montrer ce que peut sortir un
amplificateur, on peut comparer deux amplificateurs différents, au
moment de faire ses courses. Seulement voilà, un premier amplificateur
donné pour 2 * 20 W peut délivrer une puissance bien supérieure à celle
pouvant être délivrée par un second amplificateur donné pour 2 * 100 W.
Rigolo, n'est-ce pas ?
Qu'est-ce que le Watt, d'un point de vue mathématique ?
A
l'école, j'ai appris que le nombre de watts dissipés dans une
résistance pure était obtenu en multipliant la valeur du courant
circulant dans cette résistance, par la valeur de la tension développée
à ses bornes :
P = U * I
ou encore en divisant le carré de la tension aux bornes de la
résistance, par sa valeur ohmique :
P = (U * U) / R
ou encore (vive les maths) en multipliant la valeur de la résistance
par le carré du courant qui y circule :
P = R * I * I
En
supposant que l'on dispose d'une résistance de valeur fixe de 10 ohms,
parcourue par un courant continu de 1 A, la tension développée à ses
bornes est de
U = R * I = 10 * 1 = 10 V.
La puissance qu'elle dissipe peut être calculée à partir des trois
formules précédentes, et est de :
P = U * I = 10 W
P = (U * U) / R = (10 * 10) / 10 = 10 W
P = R * I * I = 10 * 1 * 1 = 10 W
Ouf, on trouve la même chose avec les trois formules, et je n'ai même
pas sorti ma calculatrice.
Remarques :
- On appelle une résistance pure, une résistance dont les
composantes
parasites (composante
selfique et composante capacitive) sont nulles ou négligées : le
courant qui circule dans la résistance est en phase avec la tension
appliquée à ses bornes, ce point est surtout important quand
on travaille avec une
tension alternative;
- La résistance est supposée supporter
une dissipation de puissance en rapport avec ce qu'elle
dissipe réellement,
ce qui lui évite de se transformer en nuage de fumée sans passer par
l'état liquide;
- Après quelques minutes de test, votre nez a humé
quelques effluves de chaleur, et vous avez eu le bon réflexe de ne pas
poser les doigts sur le composant.
Alternatif vs Continu
Dans l'exemple précédent, on disposait d'une tension continue
et d'un courant continu,
qui ne variaient pas dans le temps. Imaginez que l'on applique une
telle
tension et un tel courant à un transducteur de type haut-parleur :
qu'allez-vous entendre ? Rien de la part du HP, mais peut-être pas mal
de gros mots de la bouche de son propriétaire. Car selon la puissance
admissible dudit HP, ce dernier se contentera de faire un plop et un
déplacement violent de sa membrane (en avant ou en arrière selon le
sens de branchement), ou de chauffer et de fumer, ce qui pourrait vous
laisser un goût amer, une sensation de "Ah, il me semble avoir fait une
connerie...". Gardons la même résistance de 10 ohms, mais
appliquons maintenant à ses bornes un signal alternatif de type
sinusoïdal, dont la
fréquence est de 1000 Hz (valeur largement utilisée pour les mesures
audio) et dont l'amplitude est de 10 Vcac (cac = crête à crête en
français, pp =
peak to peak en anglais). L'amplitude du signal est
de 10 V comme pour l'expérience précédente avec une tension continue,
mais comme la tension varie maintenant sans arrêt entre le min et le
max (augmentation, puis diminution, puis à nouveau augmentation, etc),
on se doute bien que la puissance moyenne dissipée par la résistance
sera moindre (on n'a pas le maximum de tension - et donc le maximum de
courant - en permanence). Et c'est à partir de ce constat, que l'on
sent que les choses vont se compliquer et qu'il va falloir jouer de la
formule...
Mais au fait, tension et courant en phase... ou pas en phase ?
L'expérience
précédente, menée sur une résistance "pure" (parfaite) est l'une de
celles qui permet de rendre facilement compte de la notion de
puissance avec une source de tension alternative. Avec un
élément qui n'est pas une résistance parfaite et qui comporte une
composante selfique ou capacitive, le courant ne suit pas la tension,
il est en déphasage (courant en avance sur la tension pour le
condensateur, tension en avance sur le courant pour la self). Or un
haut-parleur est avant tout une bobine, et le calcul de la puissance
absorbée par cette dernière ne peut pas se faire comme on le fait avec
une simple résistance. Le fonctionnement d'un HP est en fait assez
complexe, car s'il présente une impédance "moyenne" (valeur qu'on
communique à l'acheteur) il présente aussi une "bosse d'impédance" et
un "creux d'impédance" où la tension et le courant sont en phase
(ce phénomène ne peut être mis en évidence qu'avec un signal
sinusoïdal). Finalement, et si
on voulait être rigoureux, il faudrait parler de Watts pour ces deux
points de fréquence précis (bosse et creux d'impédance) et parler de
Volts-Ampères pour toutes les autres fréquences, où interviendrait
alors le terme "cos-phi" pour prendre en
compte le déphasage entre tension et courant. Pour un soucis de
simplification, nous considèrerons dans la suite de cet article, que le
courant et la tension sont toujours en phase, ce qui bien sûr est faux.
Mais soyons donc gentil de temps en temps avec nos neurones...
Watts RMS (puissance efficace)
RMS = Root Mean Square
La
valeur efficace (ou RMS) d'un courant Ieff produit par un signal
périodique (non continu) de période T (de fréquence 1 / T) dans une
résistance R, est égale au courant continu Ic qui provoque le même
effet (qui dans le cas qui nous concerne produit la même élévation de
température) dans une même résistance, pendant la même durée T.
La valeur obtenue est une
puissance moyenne, et on pourrait fort bien se contenter de l'appeler
"puissance", avec le symbole d'unité "W", tout simplement.
La puissance RMS n'existe pas
Utiliser le terme "puissance RMS" pour exprimer la puissance de sortie
d'un amplificateur peut être vue comme un abus de language, même si on
peut l'obtenir à partir des valeurs de tension RMS et de courant RMS
(valeurs toutes deux efficaces). Réservons
cette appellation pour les valeurs de tension ou de
courant, et
oublions-là pour exprimer la puissance des amplificateurs BF.
Remarque
: on ne peut pas tirer d'autres données viables de la valeur
de la
puissance obtenue, si on ne connait pas la forme du signal utilisé pour
la mesure. Un signal carré d'amplitude 10 Vcac injecté dans une
résistance de 10 ohms, ne produit pas le même effet qu'un signal
sinusoïdal de même amplitude (10 Vcac) injecté dans la même résistance.
La majorité des mesures (de puissance, mais aussi de distorsion ou de
diaphonie) s'effectuent avec un signal de forme sinusoïdale.
Exemple pratique
Supposons
qu'un étage de sortie d'un amplificateur BF travaille sous une tension
continue symétrique de +/-20 V et que cet étage est chargé par un HP
d'impédance 4 ohms. La tension crête à crête aux bornes du HP
peut
ainsi atteindre 40 V au maximum (excursion entre -20 V et +20
V,
on néglige les chutes de tension dans les transistors de
sortie). La tension efficace est égale à la tension max (20 V
en
valeur absolue) divisée par 1,41 (racine de 2 ), soit :
Veff = Vmax / 1,41
Veff = 20 / 1,41 = 14,2 Veff
La puissance "efficace" serait donc de :
Peff = (U * U) / R
Peff = (14,2 * 14,2) / 4 = 50 Weff
Ce
calcul simple montre une chose étonnante : la tension d'alimentation
joue un rôle capital dans la puissance que l'amplificateur
peut
délivrer au HP. Ah, tant qu'on y est, ne pas oublier
le
courant crête que l'alimentation doit pouvoir fournir. Avec 50 W sous 4
ohms, ça doit bien faire dans les 3,5 A, ou un truc du genre. Hum...
donc pour un ampli stéréo de 2 x 50 W, il nous
faudrait 7 A.
Je vais y réfléchir...
Voyons maintenant quelle puissance (théorique et maximale,
en négligeant les pertes dans les composants de puissance) on serait
capable de débiter dans une charge de 4 ohms, avec différentes
valeurs de tension d'alimentation :
- Avec alim simple +12 V (4,25 Veff) : Pmax = (4,25
* 4,25) / 4 = 4,5 W
- Avec alim symétrique +/- 12 V (8,5 Veff)
: Pmax = (8,5 * 8,5) / 4 = 18 W
- Avec alim symétrique +/- 18 V (12,7 Veff)
: Pmax = (12,7 * 12,7) / 4 = 40 W
- Avec alim symétrique +/- 24 V (17 Veff) :
Pmax = (17 * 17) / 4 = 72 W
- Avec alim symétrique +/- 36 V (25,5 Veff)
: Pmax = (25,5 * 25,5) / 4 = 160 W
- Avec alim symétrique +/- 60 V (42,5 Veff)
: Pmax = (42,5 * 42,5) / 4 = 450 W
Bon,
au delà de +/-50 V, ça commence à faire et le choix des transistors de
sortie demande une attention particulière... De plus, à partir d'une
certaine puissance on a avantage à utiliser l'amplification numérique
(classe D) pour laquelle les méthodes de calcul diffèrent quelque peu.
Watts moyens (puissance moyenne)
Si on multiplie des
volts RMS par des ampères RMS, on obtient..... des watts moyens, c'est
ce qu'on a vu ci-avant. D'un point de vue mathématique, pour obtenir
une puissance moyenne, il faut effectuer plusieurs mesures de tension
et de courant qui se suivent dans le temps (valeurs instantanées),
faire la somme de l'ensemble des valeurs mesurées qui auront au
préalable été élevées au carré, puis enfin diviser
le total obtenu par le nombre de mesures réalisées dans une période de
temps donnée. C'est ainsi que procèdent certains
wattmètres du commerce (il existe d'autres méthodes). La puissance
moyenne est celle que peut fournir
l'amplificateur en régime "continu", tout du moins sur une longue
période, sans trop s'essoufler et sans que les éventuelles protections
de sortie (notamment contre les surchauffes) n'entrent en service :
plusieurs heures d'affilée à pleine puissance, ce qu'on ne trouvera
guère en pratique avec une vraie musique, mais au moins on dispose
d'une données technique (physique) solide.
Bien entendu, il
est important de savoir quel taux de distorsion maximal on s'autorise,
car là encore, ça peut aller dans un rapport de 1 à 100 :
- 0,1 % de distorsion pour un ampli hi-fi
- 1 % de distorsion pour un ampli de sono
- 10 % de distorsion pour un ampli de voiture (pensez donc,
le bruit du
moteur cache la distorsion).
La puissance moyenne est celle qu'il faudrait systématiquement utiliser
pour
exprimer la puissance de sortie d'un amplificateur audio, même si les
datasheet (documents techniques écrits par les fabricants de composants
électroniques) affichent tout de même toujours des puissances RMS,
qu'un
technicien est malgré tout capable de "comprendre".
Watts crête et Watts crête à crête (puissance crête et
puissance crête à crête)
La
puissance crête est celle que l'on a quand la tension alternative
appliquée à la charge (la résistance ou le haut-parleur) est maximale.
Quand le signal est une tension alternative de type sinusoïdale, la
tension crête est égale à la tension efficace (RMS) multipliée par
1,41 (racine carrée de 2). Pour le crête à crête, même principe que
pour la tension crête, sauf que là on tient compte des alternances
positives et négatives : la tension crête à crête est égale à la
tension efficace (RMS) multipliée par 2,82 (2 fois racine carrée de 2),
si le signal de mesure est de type sinusoïdal.
Watts musicaux (puissance musicale)
On
obtient ici une valeur égale à la puissance efficace (RMS) multipliée
par un facteur qui est le plus souvent de 2, mais qui peut aussi
parfois être de 1,5 ou de 3. Les watts musicaux correspondent à la
puissance
que peut soutenir l'amplificateur pendant un court instant (on parle de
régime impulsionnel) et non de façon continue, sans apporter de
distorsion par ecrêtage. En toute rigueur, la mesure de la puissance
musicale devrait être faite avec des signaux test de type amortis
(décroissance progressive et rapide, comme l'est le son produit par un
instrument de percussion - grosse caisse ou tom par exemple), et dont
la fréquence
devrait être comprise entre 250 Hz et 500 Hz, endroit du spectre audio
où l'on constate de très fortes crêtes dans un passage musical joué par
un orchestre de musique classique, ou dans un morceau où les coups de
grosse caisse n'ont pas été complètement ratatinés par un limiteur de
modulation.
Watts PMPO
PMPO = Peak Music Power Output
Les
Watts PMPO sont sans doute les plus risibles de tous, tant ils ne
correspondent à rien de sérieux. La puissance PMPO est mise en avant
pour donner "du corps" à des amplificateurs ou à des petites enceintes
amplifiées qui ne délivrent que des petites puissances,
et correspond par exemple à la puissance crête qu'une seule
voie
d'un amplificateur stéréo serait capable de fournir à un instant donné
et de façon très brève. La valeur obtenue est en générale très
supérieure à la puissance moyenne, on trouve parfois des rapport
allant de 10 à 50, soit une puissance annoncée de 50 W PMPO pour une
puissance efficace de 1 Watt ! C'est vraiment du n'importe quoi, mais
c'est un argument de vente imparable pour celui qui n'y connait rien !
Watts DIN
La
puissance DIN est d'origine allemande, avec un rapport de 1,66 par
rapport à la puissance efficace ou RMS (vous savez, cette façon de
parler de la puissance que l'on devrait mettre aux oubliettes). Ainsi,
une puissance de 6 W RMS (argh) peut aussi s'écrire 10 W DIN.
Comment tromper les gens ?
1 - En employant des unités hors du commun et dont la grandeur n'a
d'égal que la bêtise humaine (lisez puissance PMPO).
2
- En indiquant une valeur unique de puissance, sans en préciser la
nature exacte, par exemple "Puissance de 500 W" pour
un ensemble stéréo. Dans ce cas, on a bien des chances de penser qu'il
s'agit d'une valeur bien gonflée, et que l'amplificateur doit surement
être en mesure de ne délivrer que quelques dizaines de watts sur chaque
canal.
3 - En utilisant l'amplificateur à moitié : imaginez
simplement un amplificateur stéréo dont les deux voies, rigoureusement
identiques, sont toutes deux capables de délivrer une puissance
efficace de 20 W quand elles travaillent de façon indépendante, et que
l'alimentation secteur a été dimensionnée pour une seule voie.
L'amplificateur est bien en mesure de délivrer 20 W efficaces sur
chacune de ses deux voies quand elles sont prises (testées) séparement,
mais l'alimentation s'écroule dès que les deux voies sont en service et
un peu poussées. Malin, non ?
4 - En entretenant l'ambiguité : à un
acheteur potentiel qui se perd dans les différentes appellations de
puissance, il est bien plus simple de lui faire gober n'importe quoi.
Différences entre signaux tests et source musicale vivante
Faire
des tests sur un ampli avec des signaux tests continus et avec une
charge purement résistive (grosse résistance de puissance) pour en
déterminer la capacité à sortir telle ou telle puissance en régime
continu est une chose. Tester l'amplificateur en situation réelle avec
des haut-parleurs (qui ne sont pas des résistances pures) et avec une
musique classique ou un bon morceau de rock, en est une autre. Il n'est
pas rare de constater une meilleur musicalité avec un amplificateur
dont la
puissance de sortie est moindre, même lors de passages assez costauds.
La seule caractéristique de puissance n'est pas un critère de choix
suffisant. La raison en est que
l'amplificateur doit non seulement pouvoir fournir une puissance
soutenue à un niveau choisi par le concepteur, mais aussi pouvoir
répondre très rapidement et sans faille à des crêtes de modulation dont
l'amplitude peut atteindre dix fois l'amplitude moyenne constatée
(surtout dans les fréquences graves, où repose la plus grosse partie de
l'énergie totale). Et on ne parle même pas des différents types de
distorsion (distorsion harmonique, distorsion de croisement, etc) qui
"passent" plus ou moins
bien à l'oreille (à ce sujet, et pour frimer un peu, vous pouvez
demander à votre revendeur préféré de vous communiquer la valeur du
gain en boucle ouverte de la section puissance, et de vous préciser le
facteur d'amortissement). Bref, on peut bien se poser la question de la
pertinence d'une unité telle que le Watt efficace ou moyenné, qui ne
rend pas
forcement compte de la capacité d'un amplificateur à traiter
correctement un signal musical réel. Mais comme il faut bien disposer
de références permettant les comparaisons entre différents appareils,
et que cette unité est facilement exploitable...
Quelques vérifications simples
On
peut très bien ne pas être un expert, quelques gouttes de bon sens
peuvent vous permettre de sentir l'arnaque, ou plus simplement d'avoir
une idée grossière de la puissance qu'est réellement capable de sortir
un
amplificateur.
- Si vous lisez sur la plaque signalétique d'un
amplificateur ou d'enceintes amplifiées (en-dessous ou à l'arrière de
l'équipement) que la consommation électrique (celle absorbée au niveau
de l'alimentation) est de 10 W, et que l'amplificateur est donné pour
délivrer 2 * 25 W, posez-vous des questions... Avec une consommation de
10 W, mieux vaut plutôt s'attendre à une puissance max de 2 * 2,5 W,
soit 10
fois moins.
- Les puissances annoncées dans les publicités ou sur
les fiches de caractéristiques des amplificateurs vendus en magasin,
sont souvent des puissances musicale (ou autre), quasiment jamais des
puissances moyennes. Les puissances annoncées dans les documents
techniques des fabricants de composants électroniques (datasheet) sont
généralement exprimées en watts efficaces.
- Si vous disposez du
schéma d'un amplificateur et que vous pouvez lire la valeur de la
tension d'alimentation utilisée pour l'étage final (partie de l'ampli
qui produit réellement la puissance), vous pouvez alors vous faire une
idée de la puissance de sortie réelle. Par exemple, pour délivrer une
puissance de 200 W sur une charge de 8 ohms, il faut une tension
d'alimentation théorique de l'ordre de 55 V. Si on tient compte des
tensions de déchet et des marges nécessaires pour un fonctionnement
correct des transistors de l'étage de sortie (qu'ils soient discrets ou
intégrés), on se rend compte qu'il faut au moins 60 V pour obtenir nos
200 W.
Et du côté du HP ?
Dans cet imbroglio de puissances aussi honnêtes que variées,
on est en droit de se demander
laquelle doit être prise en compte pour choisir les HP qui vont bien.
Doit-on se focaliser sur la puissance efficace, qui représente une
"équivalence" à un régime sous tension continue, et dans ce cas prendre
un HP de 50 W pour un ampli de 50 W RMS ? Ou au contraire doit-on
s'inquiéter de la puissance crête à crête, auquel cas il faudrait
doubler la puissance admissible du HP et choisir un HP de 100 W pour un
ampli de 50 W RMS ? Et qu'en est-il du rendement du HP ?
Puissance admissible
Dans la pratique, on voit un peu de tout, mais globalement, le sens de
la marge dépend de l'application :
- En hi-fi, il est souvent préconisé de prendre un HP capable
de
supporter une puissance supérieure à la puissance que peut délivrer
l'amplificateur, par exemple HP de 50 W pour un ampli de 25 W RMS.
Surtout pour de la musique classique, avec une écoute qui se fait
généralement à volume faible ou moyen, avec de forte crêtes.
- En
sono, c'est plutôt l'inverse, l'amplificateur peut délivrer une
puissance supérieure à celle que peut supporter le HP (par exemple
ampli de 150 W pour un HP de 100 W). On n'y passe pas beaucoup de
musique classique (sauf en séances rétro peut-être, avec des valses
jouées par un orchestre symphonique) et on peut se trouver souvent en
limite de distorsion, point où les HP d'aigus ne se sentent pas trop à
l'aise et courent plus le risque d'être détruits...
Il est intéressant de noter que très souvent, les HP qui
supportent une puissance très élevée (par exemple puissance admissible
de 500 W ou 1000 W) ont un rendement et une qualité de restitution très
moyens. Et que parfois même, un HP de 10 W peut délivrer plus
de
puissance sonore qu'un HP de 100 W, pour une puissance identique en
sortie amplificateur (par exemple 5 W ou 10 W).
Rendement
La
puissance sonore perçue par nos oreilles dépend de la puissance
de sortie de l'amplificateur, mais aussi de la sensibilité des
haut-parleurs et de leur rendement qui oscille entre 0,5%
et 5% (au moins 95% de la puissance électrique fournie par
l'amplificateur est perdue en chaleur dans la bobine mobile du
transducteur/HP). La sensibilité d'un haut-parleur est exprimée en
décibel et renseigne sur la capacité à produire une certaine pression
acoustique pour un niveau électrique donné et à une distance
donnée (par exemple 88 dB/1W/1m). Pour rappel, 10
-12
W/m
2
est le seuil de sensibilité de l'oreille humaine, et correspond au 0
dB. Un amplificateur de 50 W couplé à un HP dont la
sensibilité est de
97 dB, produira globalement la même puissance sonore qu'un ampli de 13
W couplé à un HP dont la sensibilité est de 103 dB. Une autre
façon de
voir la chose : plus la sensibilité d'un HP est faible, et
plus il faut
disposer d'un amplificateur puissant pour obtenir une même pression
accoustique
(même puissance sonore perçue par l'oreille). On a donc intérêt à
choisir des HP
possédant une sensibilité élevée pour pouvoir "se contenter" d'un ampli
de
plus faible puissance, qui sera moins sollicité et proposera en général
une meilleur qualité sonore.