Electronique > Théorie > Bluetooth et qualité audio

Dernière mise à jour : 27/09/2015

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Préambule

A l'origine, le système de liaison sans fil Bluetooth (BT) a été mis au point pour les périphériques sans fil des téléphones portables (oreillette par exemple). Comme ce type de liaison ne nécessitait ni une très haute qualité sonore ni une grande bande passante, il était possible d'appliquer une compression (réduction) de débit très élevée. Méthode adaptée à de la voix mais moins sympathique pour de la musique hifi, surtout si celle-ci a déjà été compressée (MP3 ou AAC par exemple). Si tous les appareils BT supportent d'office le codage audio SBC (SubBand Codec), ils doivent aussi supporter les codecs "optionnels" tels que ATRAC, MPEG audio 1 et 2, MPEG 3 et 4 AAC dont la liste est donnée dans la spécification A2DP (Advanced Audio Distribution Profile). Rappelons en passant que le codage MP3 est en fait du MPEG1 couche 3 (layer 3) et que de fait il est supporté par la norme BT, et que le codage ATRAC est celui que Sony avait utilisé pour son MiniDisc.

Codec et compression additionnelle ?

En théorie, une liaison BT permet de transmettre un flux audio MP3 ou AAC sans le recompresser - et donc sans perte de qualité - même si ces derniers sont compatibles SBC et/ou aptX. Mais pour cela, il faut que les deux appareils qui communiquent acceptent de fonctionner avec ces formats "natifs" et n'exploitent pas d'office un codec "annexe". Appliquer une (nouvelle) compression de débit sur un signal (déjà) compressé est contre nature et très fortement déconseillé, car la dégradation apportée par la recompression est très audible et souvent même catastrophique.

Qualité audio...

Outre le taux de compression binaire élevé, d'autres facteurs s'ajoutent à la dégradation sonore. Le fait que le Bluetooth fonctionne dans une zone de fréquence de 2,4 GHz n'arrange rien, car beaucoup d'autres appareils partagent cette allocation : wi-fi, souris et claviers sans fil, four à micro-ondes (dont on sait qu'ils ne présentent pas de fuite). Mais soyons raisonnables, ces perturbateurs ne jouent pas directement sur la qualité audio, même s'ils peuvent parfois et de manière indirecte occasionner des petites coupures ou des clics. Ajouter à cela que la qualité des écouteurs des casques BT ou des HP des enceintes BT n'est pas toujours au top (la facture du produit fini ne doit pas être trop salée tout de même) on imagine ce à quoi on peut s'attendre. Dans le cas d'une liaison de courte distance, et même avec du "bon" matériel, on peut encore observer à la réception une dégradation sonore du flux audio transporté. La faute au transport ? Pas forcément. La partie "conversion analogique" des circuits BT de bas de gamme est souvent mal conçue et cela impacte la dynamique du signal restitué (bruit de fond élevé avec des gazouillis peu agréables et une dégradation sonore très audible lors des passages musicaux de faible amplitude). N'oublions pas en effet que les points sensibles dans une chaine audio numérique sont la numérisation et la reconversion en analogique, et que si les convertisseurs utilisés ne sont pas au top, alors le résultat final ne sera pas top. Dans tous les cas, et quelque soit le codec adopté, la qualité audio d'une liaison sans fil BT n'égalera jamais celle d'une vraie liaison filaire.

aptX (ou apt-X)
aptX est le nom d'un codec spécialement étudié pour le transport audio sur une liaison Bluetooth, avec une "haute qualité" de conversion (jusqu'à 384 kbps, compression avec perte comme pour le MP3). Bien entendu cette notion de "haute qualité" ne correspond pas à la "vraie" qualité d'un CD audio, mais elle peut sans rougir être comparée à la qualité d'un MP3 à 256 kbps (sans recompression).

SBC
SBC = SubBand Codec
Codec plus ancien qui supporte un débit de 320 kbps. Malgré son côté un peu "vieillot", ce codec est encore très largement utilisé, même sur les produits haut de gamme les plus récents. En mode "High Quality" Join Stereo 44.1 kHz, le débit est de 328 kbps.

Bluetooth mais meilleur CNA (DAC) ?

La qualité d'un son joué sur un système multimédia (tablette, iPhone, etc) dépend principalement du convertisseur numérique/analogique (CNA ou DAC en anglais, pour Digital to Analog Converter). On part bien sûr du principe que le son original qui a été numérisé est de très bonne qualité. C'est en effet grâce à ce "composant" CNA que le son numérique peut être restitué (après amplification de puissance) aux haut-parleurs des enceintes ou écouteurs d'un casque. Quand on branche un casque sur le mini-jack (3,5 mm) de sortie audio d'un tel appareil, le son est restitué du mieux qu'il peut, c'est à dire selon la qualité du CNA, des composants qui l'entourent et surtout de la qualité de conception du circuit dans son ensemble (dessin du circuit imprimé, entre autre). Sur les appareils bas de gamme, on a souvent affaire à un circuit de conversion qui donne un résultat moyen ou bon, mais qu'on qualifie d'amplement suffisant pour écouter de la musique en condition "lambda". Quand un appareil dispose d'une sortie audionumérique, on peut utiliser un CNA externe, de bien meilleure qualité. Mais cela exige souvent un appareil alimenté sur le secteur et relié à un ensemble amplificateur/enceintes de haute qualité. Si l'appareil concerné ne dispose pas de sortie audionumérique, la question ne se pose pas. Sauf... si le BT est implémenté, car cette liaison peut être vue comme une "sortie" audionumérique, à laquelle on peut "raccorder" un CNA externe (avec récepteur BT). Intéressant, sauf que le débit max imposé par la liaison BT interdit toute transmission d'un son dans un format numérique linéaire (non compressé). On ne peut donc en aucune manière certifier que l'usage d'un convertisseur CNA externe connecté via une liaison BT améliorera les choses, sauf si bien sûr le CNA implémenté dans l'appareil où est lu le son est de piètre qualité. On peut dresser le tableau suivant :
- si le son d'origine est très mauvais (encodé avec un débit binaire très faible), la qualité du son restitué sera mauvaise dans tous les cas, liaison filaire ou liaison BT.
- si le CNA du "lecteur audio" est de mauvaise qualité, le son restitué en sortie du lecteur sera mauvais, même avec une connexion directe (liaison filaire). Avec un récepteur BT de bonne qualité, le son restitué en sortie du récepteur BT pourra dans ce cas être meilleur.
- si le CNA du récepteur BT est de mauvaise qualité, le son restitué en sortie du récepteur BT sera mauvais.
La logique l'emporte : si pour le même prix vous pouvez avoir un casque filaire et un casque BT, la probabilité est grande que le casque filaire sonne mieux. De même, un casque BT de haut de gamme sonnera sans doute mieux qu'un casque filaire qui coûte quelques euros. Cela montre bien qu'il n'existe pas de formule magique : on ne peut pas dire qu'une liaison BT est mieux ou moins bien qu'une liaison filaire. Mais il est clair que le récepteur BT doit être parfaitement bien conçu si on veut de lui un son de haute qualité. Et là, il semblerait bien qu'il faille mettre le prix !

Pourquoi s'obstiner à utiliser une liaison sans fil ?

Oui, pourquoi s'obstiner alors que l'on sait que la qualité audio sera moins bonne qu'avec une liaison filaire, et que le coût d'achat d'un appareil BT est supérieur à son homologue avec liaison filaire ? Curieux tout de même de trouver des appareils BT "hifi" à plusieurs centaines d'euros (NAD Viso par exemple) ! Voyez-vous mon cher monsieur, le BT c'est pratique et on peut y trouver des fonctionnalités que le filaire ne permet que difficilement. Certes, les appareils BT portables utilisent des piles ou des batteries qu'il faut régulièrement charger, mais... c'est portable ! Et puis qu'importe la baisse de qualité sonore imputée à la liaison elle-même, si la restitution du son est assurée par des petits HP de quelques centimètres de diamètre ?
Nous voyons donc fleurir ici et là plusieurs types d'utilisateurs finaux :
- ceux qui veulent s'équiper d'un système "haut de gamme" en évitant de tirer des câbles difficiles à camoufler.
- ceux qui cherchent le truc portable à moindre coût pour écouter de la musique pendant la préparation du repas, le bricolage dans le garage ou le jardinage (pas trop loin de la maison tout de même) et qui ont conscience des limites du système.
- ceux qui "ne savent pas" et qui ne se posent pas la question.
Il est vrai que la simplicité d'emploi d'un casque audio sans fil ou de petites enceintes amplifiées rend ces appareils fort attrayants, et qu'en environnement bruyant il est très difficile de juger de la qualité. Alors hop à la cave, le casque audio à infrarouge qui impose à l'utilisateur de rester à sa place, la liaison HF permet de se déplacer et même de faire sa gym. Et puis soyons honnêtes, tout le monde n'est pas audiophile et ne sait pas forcément ce qu'est un bon son. Moi qui côtoie régulièrement des jeunes qui sont habitués à des fichiers audio MP3 crasseux récupérés ici et là sur la toile, je me rends bien compte qu'il manque souvent des références de qualité. Je m'emploie, dans mes cours sur les défauts sonores, à sensibiliser les jeunes oreilles. Mais il y a encore du travail... Oh, et puis après tout, quel risque prend-on pour transmettre le son d'une web radio dont la qualité "originale" est déjà... douteuse ?

Historique

27/09/2015
- Première mise à disposition.