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Dernière mise à jour : 19/03/2023

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Présentation - Codes type - Codes valeur

Présentation

Cette page parle des condensateurs qui assurent une liaison entre deux étages audio, mais le principe s'applique à des domaines non audio (vidéo par exemple).

Pourquoi mettre un condensateur dans le trajet du signal ?

Plusieurs raisons à cela :

Pour réduire le domaine des fréquences (bande passante) des signaux à faire passer
Autrement dit, pour laisser passer certaines fréquences et en atténuer d'autres. En effet, un condensateur de liaison, associé à l'impédance d'entrée de l'étage qui fait suite, constitue un filtre audio de type passe-haut (appelé aussi coupe-bas) le plus simple qu'on puisse concevoir.

Pour empêcher une tension continue de passer d'un étage à l'autre

La plupart du temps pour simplifier la conception du circuit. Un montage audio est en effet souvent constitué de plusieurs étages, et chaque étage comporte des composants qui ont été calculés pour un fonctionnement optimal. Par exemple dans un montage actif à transistor, ce dernier est polarisé par des tensions continues dont la valeur a été choisie pour un régime de fonctionnement donné. Le condensateur laisse passer le signal audio (alternatif) et bloque toute tension continue (tension de polarisation, par exemple).

Dans le schéma montré en exemple ci-après, un signal audio (alternatif) d'amplitude 2 V crête à crête (-1 V à +1 V) est superposé à une tension continue fixe de +5 V, le tout est appliqué au point A. On trouve trouve donc en ce point A une tension variant entre +4 V et +6 V, centrée sur +5 V (minimum égal à +5 V -1 V ; (maximum égal à +5 V +1 V). Au point B, la tension continue de +5 V n'est plus présente, il ne reste que le signal BF "utile" variant entre -1 V et +1 V.


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Il est tout à fait possible de se passer de condensateur de liaison pour relier plusieurs étages électroniques entre eux (au stade de la conception) mais cela complique le calcul des composants et demande une grande maîtrise (grande expérience serais-je tenté de dire) du comportement de l'ensemble, notamment lors de variations de température.

Pour empêcher un potentiomètre de réglage (de volume par exemple) de cracher
La présence d'une tension continue sur un potentiomètre est en effet fortement déconseillée, si vous voulez que ce dernier ait une durée de vie décente. A noter qu'il faut quasiment toujours mettre un condensateur à l'entrée du potentiomètre (extrémité), comme à sa sortie (curseur), car une tension continue peut parfaitement venir de l'étage qui précède ou de l'étage qui suit.

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L'ajout de deux condensateurs pour un simple potentiomètre de volume devrait être, vous vous en doutez, évité au possible, ne serait-ce que pour éviter la résultante complexe d'impédance qu'ils introduisent (une différenciation suivie d'une intégration), provoquant principalement de la distorsion de phase (et en bout de bande, ça s'entend particulièrement bien). La meilleure solution est de s'arranger pour qu'aucune tension continue ne parvienne au potentiomètre, en utilisant par exemple des AOP avec correction d'offset.

Limites en tensions AC et DC posées par le condensateur

L'utilisation d'un condensateur non polarisé ne pose aucun problème avec les tensions continue ou alternative, tout du moins tant que la tension présente à ses bornes ne dépasse pas sa tension de service maximale (par exemple 16 V ou 63 V). 

En revanche, l'utilisation d'un condensateur polarisé (chimique aluminium ou tantal) impose une contrainte, celle d'appliquer obligatoirement une tension respectueuse des polarités [+] et [-]. Ainsi, un condensateur polarisé ne devrait jamais avoir à supporter une tension inverse, que cette dernière soit fixe (DC) ou progressive (AC). Dans les faits, un condensateur polarisé peut supporter une tension inverse de faible valeur (< à 1 V). Dans la mesure du possible toutefois, il faut éviter cette situation qui stresse le condensateur et le vieillit prématurément.

Ne nous attardons pas sur le cas du condensateur de filtrage principal d'une alimentation secteur qui reçoit en permanence un signal alternatif (tension AC redressée en mono-alternance ou en bi-alternance par une ou plusieurs diodes). Ce condensateur voit toujours à ses bornes une tension de même polarité, donc pas de soucis.

Pour un condensateur de liaison, la réflexion doit aller plus loin. Ce condensateur peut en effet voir des tensions diverses (DC+AC) d'un côté comme de l'autre. Sachant cela, peut-on utiliser un condensateur polarisé et si oui, dans quel sens faut-il le câbler ? 

Avant de répondre à cette question, précisons que nous ne savons pas toujours ce qu'il y aura en amont d'un condensateur de liaison en entrée d'un équipement (comment est conçu l'étage de sortie de la source qui précède ?), tout comme il est difficile de savoir ce qu'on trouvera en aval d'un condensateur de liaison en sortie d'un équipement (comment est conçu l'étage d'entrée du récepteur qui fait suite ?). De telles "conditions" imposent parfois d'accepter des compromis...

   

Montage à tension unique

Dans un montage audio dont la source d'alimentation est unique (VCC), on a l'obligation de créer un point milieu (VCC/2) pour centrer le signal audio à une valeur non nulle et ainsi préserver (ne pas raboter) les alternances négatives (si VCC est une tension positive) ou le alternances positives (si VCC est une tension négative). Dans un tel cas de figure, on est obligé d'utiliser des condensateurs de liaison en entrée et en sortie pour éviter de transmettre aux circuits externes la tension de polarisation fixée à mi-tension (VCC/2) dans le circuit.

Connaissant la tension de polarisation interne (VCC/2) et supposant qu'aucune tension continue n'est envoyée à l'entrée par le circuit source qui précède ni à la sortie par le circuit récepteur qui suit, on doit câbler les condensateurs de liaison de la façon suivante :

- si la tension d'alimentation VCC est positive (cas le plus fréquent des montages récents), il faut placer le pôle [+] des condensateurs de liaison à l'intérieur du circuit et le pôle [-] vers l'extérieur
- si la tension d'alimentation VCC est négative (cas d'anciens montages avec transistors au germanium, par exemple), il faut placer le pôle [-] des condensateurs de liaison à l'intérieur du circuit et le pôle [+] vers l'extérieur.

Dans le cas où l'on veut éviter qu'une éventuelle tension continue externe ne vienne perturber le montage, il est préférable d'utiliser des codensateurs non polarisés. Cela ne pose généralement pas de problème pour les circuits audio dont l'impédance d'entrée est moyenne ou élevée, car la valeur du condensateur de liaison peut être inférieure à 1 uF.

   
Montage à tension symétrique (double)

Dans un montage audio dont la source d'alimentation est double/symétrique (+VCC et -VCC), il est inutile de créer une tension de polarisation additionnelle de style "masse virtuelle". Le signal audio reste tout naturellement centrée sur une valeur nulle (0 V de la masse), puisque ses alternances positives et négatives peuvent être traitée de manière égale par le circuit. En première approche et en théorie, aucun condensateur de liaison n'est requis ni en entrée ni en sortie.  

Si dans ce type de montage on trouve des condensateurs de liaison, c'est surtout pour éviter que d'éventuelles tensions continues venant de l'extérieur ne viennent semer la pagaille. Dans ce cas de figure, l'idéal est d'utiliser des condensateurs non polarisés, puisqu'il est impossible de prévoir si les éventuelles tensions continues infligées au montage seront positives ou négatives.

Un internaute m'a posé la question suivante : "Quand dans un montage audio vous placez un condensateur chimique polarisé en entrée, pourquoi mettez-vous toujours son pole [-] sur le connecteur d'entrée ?" Ma réponse est simple : parce que je considère que dans la très grande majorité des cas, on trouvera une tension nulle en sortie de la source audio qui précède. Mais aussi (et peut-être surtout) parce que j'ai l'habitude de procéder ainsi avec les montages dotés d'une alimentation simple positive pour lesquels le pole [-] du condensateur est toujours orienté vers le connecteur d'entrée, et que les habitudes ont la vie dure ;)

   

Quel condensateur choisir ?

Cela dépend des moyens que l'on veut bien y mettre et du contexte d'utilisation.

Pour un montage audio "normal"
Cela dépend de la valeur du condensateur. En règle générale, la valeur d'un condensateur de liaison placé à l'entrée d'un montage audio est assez faible, comparativement à la valeur d'un condensateur de liaison placé sur une sortie. Cela se conçoit assez aisément : l'impédance d'une entrée est généralement élevée, alors que l'impédance de sortie est en général faible. La valeur du condensateur est choisie en fonction de cette impédance, de telle sorte que la fréquence de coupure du filtre (créé par le condensateur et l'impédance) ne gêne pas le passage des fréquences audio désirées. Globalement, on peut dire que jusqu'à la valeur de 1 uF, il est préférable de prendre des condensateurs non polarisés à film de type MKS, MKP, MKT ou MKC. Ne pas utiliser si possible de condensateurs céramiques, qui possèdent une non-linéarité assez élevée. Au delà de 1 uF, on choisira des condensateurs chimiques, et on évitera les tantales qui peuvent ajouter une distorsion bien plus importante s'ils sont incorrectement polarisés (au moins 1% de distorsion contre 0,01% à 0,1% pour les chimiques aluminium). A noter cependant que j'ai récemment (09/04/2009) eu un retour d'un passionné d'audio qui a essayé de nouveaux condensateurs au tantale solide (hermetically sealed), qui ont fait très bon effet. Pourquoi éviter l'emploi de condensateurs de type plastique non polarisés de très haute qualité au-delà de 1 uF ? A cause de l'encombrement et du prix, tout simplement. En usage pro par contre, aucun souci, vous pouvez sans problème monter en parallèle quatre (ou plus) gros condensateurs de 1 uF non polarisés. Si vous allez fouiller dans les schémas audio haut de gamme de Elektor, vous constaterez qu'il s'agit même d'une technique assez "courante". Mais attention tout de même, on parle ici de condensateurs dont la valeur totale peut grimper à quelques uF. Il va (presque) de soi qu'on ne va pas envisager la mise en parallèle de 100 condensateurs de 1 uF pour en obtenir un équivalent de 100 uF ! A partir d'un moment, il faut bien faire la bascule vers le condensateur chimique.

Pour un montage audio "haut de gamme"
Pour les faibles valeurs, même conseils : les condensateurs non polarisés au téflon ou styroflex (MKS) sont excellents et largement conseillés. Ceux au polypropylène (MKP) sont aussi très bons, suivis de près par les MKT et les MKC. Pour les fortes valeurs (disons pour fixer un ordre de grandeur à partir de 10 uF), l'usage de condensateurs "dédiés audio" (marque Elna ou BlackGate par exemple) sont recommandés. A noter la possibilité (si ce n'est un bon conseil) de placer un condensateur de type MKS de faible valeur (100 nF par exemple) en parallèle avec le condensateur de forte valeur, afin d'améliorer le comportement en régime impulsionnel (meilleur rendu sonore dans les aigus).

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C'est une technique également employée pour le découplage des alimentations, qui donne de très bons résultats car chaque condensateur travaille dans son domaine de compétence.

Condensateurs polarisés ou non polarisés ?
Certains montages utilisent des condensateurs non polarisés (NP) ou bipolaires, qui représentent une excellente solution aux problèmes de polarisation et de distorsion qui y sont liés. Si vous devez utiliser un tel composant et que vous n'en trouvez pas (ou si celui que vous avez trouvé est d'un prix trop élevé pour votre bourse), vous pouvez à la limite câbler tête-bêche deux condensateurs identiques. Deux condensateurs polarisés montés de la sorte équivalent à un seul condensateur non polarisé (dans le schéma qui suit, le signe - de "C1-C2" indique l'association en série des deux condensateurs, et non pas une opération algébrique).

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Cette façon de faire n'est pas aussi sexy qu'un condensateur non polarisé (ça occupe plus de place), mais c'est une solution "de secours". Notez que la capacité résultante de deux condensateurs de même valeur ainsi montés en série équivaut à la moitié d'un seul. Les deux condensateurs de 220 uF du schéma précédent équivalent donc à un condensateur unique de 110 uF.

Valeur d'un condensateur de liaison

Un condensateur de liaison C forme un filtre passe-haut / coupe-bas avec la résistance d'entrée R (ou impédance d'entrée Z)  du circuit qui suit. La valeur du condensateur dépend donc de la fréquence de coupure Fc désirée dans le bas du spectre, selon la formule suivante :

Fc = 1 / (2 * Pi * R * C) 

ou, quand la formule est retournée :

C = 1 / (Fc * 2 * Pi * R)

D'une manière générale et en basse fréquence, on se retouve souvent avec quatre ordres de grandeur d'impédance d'entrée (ou de charge) :

- impédance "très faible", entre 2 et 16 ohms (haut-parleur)
- impédance d'entrée "faible", 200 à 2 kO (entrée microphone)
- impédance d'entrée "moyenne", entre 10 kO et 100 kO (entrée ligne)
- impédance d'entrée "haute", supérieure à 300 kO (entrée instrument / Hi-Z)

Pour une même fréquence de coupure, la valeur du condensateur de liaison peut varier dans de grandes proportions puisqu'elle dépend de l'impédance d'entrée. Fixons par exemple la fréquence de coupure à 10 Hz et calculons la valeur du condensateur de liaison C requise pour quatre valeurs différentes d'impédance d'entrée Z.

- Si Z = 4 ohms, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 4) = 0.00398 F = 3980 uF
- Si Z = 600 ohms, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 600) = 0.0000265 F = 26 uF
- Si Z = 2 kO, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 2000) = 0.00000796 F = 7,9 uF
- Si Z = 10 kO, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 10000) = 0.00000159 F = 1,6 uF
- Si Z = 47 kO, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 47000) = 0.00000033 F = 330 nF
- Si Z = 1 MO, alors C = 1 / (10 * 6,28 * 1000000) = 0.000000016 F = 16 nF

Voila qui explique pourquoi on trouve des valeurs généralement "faibles" en entrée d'un préamplificateur BF (dont la charge sera de plusieurs dizaines de kO) et des valeurs généralement "élevées" en sortie d'un amplificateur de puissance BF (dont la charge sera le plus souvent un haut-parleur de 4 à 16 ohms).


Pourquoi l'ajout d'un condensateur de liaison occasionne-t-il parfois des "Plops" ?

Cela est lié à des différences de tension existantes sur les deux pattes d'un condensateur. Pour être plus précis, cela est souvent causé par l'absence de référence de potentiel sur au moins une des deux bornes du condensateur. Pour mieux comprendre, examinons le dessin suivant, qui pourrait représenter la sortie d'une console audio que l'on souhaiterait raccorder sur l'entrée d'un ampli de puissance. Le condensateur C1 est situé en bout de chaîne de la console de mélange (sortie principale) et le condensateur C2 est placé juste à l'entrée de l'ampli de puissance.

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Supposons que l'électronique qui précède le condensateur de sortie de la console (point A de C1) laisse "traîner" une tension continue de +6V. Cette tension ne doit pas être transmise à la sortie de la console, et c'est la raison principale pour laquelle le constructeur de cette console a décidé de mettre un condensateur à cet endroit. Le point B de C1 est laissé en l'air, sauf quand la sortie est raccordée à quelque chose. Côté ampli, le constructeur, qui s'est dit "Avec tous ces sagouins de concepteurs, il ne serait pas très surprenant qu'une tension continue arrive sur l'entrée de mon ampli, et cela m'embête bien. Je vais donc ajouter un condensateur d'entrée, afin de pallier cette éventualité". Et de ce côté-ci, on se retrouve avec un condensateur C2, dont le potentiel de la patte B est de +1V parce que l'électronique qui suit fait en sorte que ce soit ainsi, et la patte A se retrouve en l'air, sauf bien sûr quand l'entrée est raccordée à quelque chose. Vous commencez à percevoir les choses ? D'un côté nous avons +6V, de l'autre, nous avons +1V. Et au raccord des deux, qu'avons-nous ? Eh bien c'est là le problème ! Une tension "bâtarde", qui va dépendre des courants de fuite des condensateurs, et se traduire par des variations plus ou moins aléatoires de la composante continue, pouvant provoquer de brusques montées ou descentes de la tension au point B. Appareils connectés, cela se traduit par un son "mou", voire distordu sur les crêtes. Lors de l'interconnection des appareils, cela peut se traduire par des plops.
La solution ? Fixer le potentiel des pattes des condensateurs à une valeur connue, de telle sorte que les condensateurs soient toujours dans un état "stable", d'un point de vue polarisation en continu. La plupart du temps, il suffit d'ajouter une résistance d'assez forte valeur (100K à 1M) entre ladite patte et la masse, pour fixer le potentiel à zéro volt, comme le montre le dessin suivant (les deux constructeurs ont finalement eu la bonne idée au même moment, mais cela coûte, de rajouter une résistance, vous savez). En procédant ainsi, tous les courants de fuite des condensateurs sont véhiculés à la masse.

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De la sorte, le potentiel des pattes des condensateurs qui restaient en l'air est désormais fixé à zéro volt des deux côtés, le "heurt" de la connexion des deux appareils sera moins brutal.

Remarques