Dernière mise à jour :
23/09/2012
Présentation
Non, vraiment, vous n'avez jamais dit ça à votre enfant ? Sans doute
pas sous cette forme quelque peu exagérée. Mais plutôt sous la forme
(bien plus sage) du genre "Arrête, tu vas tomber !" ou "Arrête, tu
vas blesser quelqu'un !". Imaginons un instant ce que ces mots
peuvent bloquer comme instinct de découverte, de prise de confiance en
soi. "Arrêtes, tu vas devenir intelligent !"...
Arrête, tu vas tomber !
Qui
n'a pas dit ça à son enfant grimpant et marchant sur un petit muret ou
se mettant debout sur un tabouret pour prendre quelque chose dans le
placard ? Aurions-nous la présence d'esprit - au moment même où l'on
constate le geste - de penser qu'il est capable de l'accomplir sans se
faire mal ? Pensez-vous... On a nous-même été
tellement protégé (et on l'est encore tellement) que chaque geste
(surtout celui des autres) apporte forcement son potentiel de danger.
Il est donc de notre devoir de porter son
oeil bienveillant sur son banbin à toute occasion, même quand
ce n'est pas nécessaire. Marcher à 20 cm du sol présente un
risque pour le petit qui accomplit ce geste pour la première fois.
Mais peut-être ce risque est-il moindre que celui bien réel du
petit qui
marche à quatre pattes à côté d'un ours. Pourtant, à peine
entre-t-il en pleine phase d'apprentissage et d'initiation à
l'équilibre que déjà on le persuade que la tâche est ardue,
difficile à accomplir sans aide extérieure, et que ses chances de
réussites sont bien faibles. Car on ne peut s'y tromper : même si on ne
le dit pas en mots clairs, notre regard de travers ou notre crainte se
voit ou se sent et entraîne le petit à penser que le risque existe
vraiment. Et s'il tombe, on va bien sûr dire "Je m'en doutais, je
l'avais bien dit !". On aurait toutes les peines du monde à penser "Il
est tombé par ma faute. Si je ne lui avais pas faire peur, ça ne serait
pas arrivé". Mais le pire n'est pas vraiment que l'évenement préssenti
et prédit survienne finalement. Le pire est que l'enfant va penser
et enregistrer le fait que l'adulte - son modèle - avait
raison. Et qu'il n'est donc réellement pas capable d'accomplir
cette tâche qui
pourtant lui semblait bien simple et sans risque - en supposant que
cette notion de "risque" existe déjà. Mais s'en sentir
incapable sur le
moment ne serait pas encore trop grave. Le risque existe bel et bien
que la
notion d'incapacité s'ancre bien profondément dans l'esprit et qu'elle
soit toujours présente à l'âge adulte. Ne connaissez-vous personne de
votre entourage qui est persuadé d'être incapable de faire quelque
chose,
avouant qu'on lui a répété maintes et maintes fois durant
son enfance ?
Arrête, le verre va tomber !
Et
l'expérience du verre que l'on fait tenir tout seul sur son menton en
aspirant fort, ça ne vous rappelle rien ? Il y a peu de temps, nous
avions un invité à la maison. Celui-ci, en voyant notre fille Louise (5
ans) faire
cette expérience pendant le diner, a été soudain pris de panique et
à crié "Attention, le verre va tomber !". Je crois que c'est moi
qui ai le plus sursauté, car sur le coup j'ai cru que le verre allait
vraiment tomber. Et puis quand je me suis rendu compte qu'il n'en était
rien, j'ai simplement dit que le risque de le voir tomber était
vraiment très faible, la petite gardant ses mains en-dessous du
verre (sans le toucher) pour le rattrapper au cas où. Il est toujours
un peu délicat de dire à un membre de la famille ou à un ami que l'on
ne doit pas faire de prédiction en de pareilles circonstances, car on
montre à l'enfant que l'on est "de son côté" et l'adulte qui subit le
"reproche" (ce que je ne considère pas comme tel) peut le vivre avec un
petit agacement. Pensez donc, une parole d'adulte qu'on remet en
question. Pourtant la question est bien là, et mon ex-femme et moi-même
avions pris le réflexe de contredire toute affirmation qui n'en était
pas
une. En l'occurence ici, le verre n'est pas tombé, on a pas le droit de
dire que c'est ce qui va arriver. Bon, vous conviendrez qu'il y a
toujours la façon de le dire, les choses sont en général plus simples à
digérer quand elles sont dites avec un sourire.
Arrête, tu vas te couper !
Que
notre enfant de 3 ou 4 ans essaye de nous couper une tranche de pain
pour nous rendre service et
on lui tombe aussitôt sur le palto... Attention à tes doigts ! Même
problématique de prédiction. On a tellement peur qu'un malheur arrive
qu'il finit par arriver ! Bien entendu nous - les parents - n'abordons pas les
choses de la même façon aujourd'hui qu'il y a 10 ans. Nous n'avons pas
toujours laissé nos enfants couper tout seul leur morceau de pain quand
ils avaient 3 ou 4 ans. Oui, par peur qu'ils se blessent. Mais quand
on y regarde bien, nous comptabilisons au
moins autant
de petits accidents, si ce n'est plus, alors qu'on est censé donner
l'exemple du "comment bien faire". Le lendemain de l'écriture de ces
lignes, notre fille Adèle (7 ans) se coupe le bout du doigt en
coupant du pain. Bah oui, ça arrive, je n'ai jamais dit le contraire.
Mais à ce moment là on ne la "surveillait" pas et ça ne l'a pas empêché
de recommencer après que sa blessure fût soignée.
Laissons leur donc un peu de mouvements !
Nous laissons nos enfants faire le maximum d'expériences tant qu'on pense
qu'elles peuvent leur être profitables sur le plan de
l'épanouissement. Ils font eux-mêmes les crêpes et les pizzas de A à Z
(préparation et cuisson). Les premières étaient très rigolotes et tout
à fait mangeables.
Timothée (10 ans)Ils
donnaient à manger au bébé avec un réel plaisir, le demandant toujours
eux-même. Et si bébé prennait à pleine main la cuillère qu'on lui
tendait, le
grand frère ou la grande soeur maîtrisait la situation et ne
s'énervait pas. "Oh bah non ma louloute, regarde, tu en a mis
partout
!"
Louise (4 ans) et Zélie (moins d'un an)Ils savent faire un gâteau de A à Z (préparation et cuisson, il suffit de lire la recette et d'y aller à sa sauce).
Louise (6 ans) Louise (8 ans)Ils épluchent les pommes de terre (s'ils le demandent) et se servent tout seul à table. Il faut juste
penser à mettre à leur disposition des plats et récipients adaptés à
leur taille (tel un cruchon de 33 cl en plus de la cruche de 1,5 l).
Le nettoyage de la table n'est pas une corvée, c'est un plaisir.
Zélie, 2 ansLes deux plus petites (6 ans et 4 ans à l'époque de la photo) me rasaient à tour de rôle.
Adèle (6 ans) et Louise (4 ans)2009 - Au
début elles avaient peur de me faire mal, mais il a suffit que je leur
dise que si cela arrivait ce n'était pas
grave. C'est
une façon de montrer qu'on a confiance en elles. De même,
tout le monde
à la maison à le droit de prendre l'appareil photo numérique et de
faire ses expériences avec, à la maison ou à l'extérieur - sauf la
petite dernière quand elle n'avait que neuf mois. Pas une seule fois on ne leur a dit de faire attention de ne pas
le casser, nous contentant de montrer les parties les plus
fragiles (écran et objectif). Ils ont bien compris qu'il s'agissait
d'un appareil fragile, et ils font attention de façon spontanée. Ne
pas les regarder d'un regard inquiet quand ils tiennent l'appareil en
main contribue à limiter le risque d'accident.
"Attention, à force de faire plein de photos, vous allez apprendre à en
faire de très jolies !"
2012
- L'appareil photo en question est revenu, comment dire...
inutilisable. Il est tombé dans du sable et quelques grains se sont
coincé dans la mécanique du zoom (j'ai essayé de réparer, en vain). Regardons le côté positif des choses : ils
ont appris qu'appareil photo numérique et bac à
sable n'étaient pas compatibles.
Tiens quand j'y pense, je me demande si mon papa n'avait pas une philosophie parallèle...
Et oui, c'est bien moi à l'âge de 2 ans...
Enfants et bricolage
Bibliographie
Le quotidien avec mon enfant - Jeannette Toulemonde - Ed. L'instant
présent
Elever nos enfants avec bienveillance - Marshall B. Rosenberg - Ed.
Jouvence
Elever son enfant autrement - Catherine Dumonteil-Kremer - Ed. La plage
L'enfant - Maria Montessori - Ed. Desclée de Brouwer
Me débrouiller, oui, mais pas tout seul (du bon usage de l'autonomie) -
Etty Buzyn - Ed. Albin Michel
Parler pour que les enfants écoutent, écouter pour que
les enfants parlent - Adele Faber et Elaine Mazlish - Ed. Relations plus
Parler aux ados pour qu'ils écoutent, les écouter pour
qu'ils parlent - Adele Faber et Elaine Mazlish - Ed. Relations plus
L'adolescence autrement - Catherine Dumonteil-Kremer - Ed. Jouvence
Papa, Maman, écoutez-moi vraiment (pour comprendre les
différents langages de l'enfant) - Jacques Salomé - Ed.
Albin Michel
Le concept du continuum (à la recherche du bonheur perdu) - Jean
Liedloff - Ed. Ambre